culottière chez Herbaut Denneulin à Roubaix, 79 ans

Dans le cadre de l’exposition Fibre féminine, nous avons rencontré Nicole Coisne, culottière chez Herbaut Denneulin à Roubaix. Aujourd’hui retraitée, elle nous explique la fabrication des pantalons.

Culottière c’est faire le pantalon, la pièce entière, donc du début jusqu’à la fin du pantalon.

Avant de travailler dans la confection plus courante, Nicole Coisne était spécialisée dans la confection de qualité. Sa marraine lui avait enseigné la couture dans ses jeunes années. Aujourd’hui retraitée, elle se souvient des bons et des mauvais aspects de son métier de culottière, couturière spécialisée dans la fabrication des pantalons. Les bons côtés d’abord, avec la convivialité des ateliers et les amies qu’elle retrouvait au travail ; puis les difficultés apparaissent : les cadences, les contrôles des supérieurs, les dangers des machines qui sectionnent les doigts. Nicole Coisne nous enseigne également quelques expressions du métier : savez-vous ce que signifie « faire la braguette » ou « éplucher le tissu » ?

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Du début jusqu’à la fin du pantalon

Je travaillais dans l’établissement Herbaut Denneulin qui faisait les costumes d’homme. Il faisait donc les vestes, les pantalons, les beaux costumes. Culottière c’est faire le pantalon, la pièce entière, donc du début jusqu’à la fin du pantalon. À Roubaix c’était rue de l’Espérance, pas loin, à peu près en face des Beaux-arts à l’heure actuelle et de la piscine de Roubaix. C’était la marque Herbaut Denneulin rue de l’Alouette où les gens venaient demander, prenaient des mesures pour un costume. C’était quand même une maison qui avait une bonne réputation à l’époque, il y a vingt-cinq, trente ans que c’est fermé, pas plus en tout cas.

C’était du beau drap

Dans l’exécution, on faisait le pantalon. Il y avait un magasin où il prenait les commandes, les gens qui venaient même individuel. Après c’est devenu plus confection courante. Mais quand ils voulaient un beau costume c’était plus cher. Ce n’était pas celle qui faisait le travail à la chaîne qui le faisait. Et puis c’était du drap, pas ces fameux jeans, c’était du beau drap.

C’était au détriment des autres ouvrières

Sur place, pendant que j’y étais et qu’on travaillait, au début on avait son temps pour coudre, pour faire sa pièce. Mais après il y avait parfois des gens derrière nous qui chronométraient le temps que vous passiez. C’était le début où après il fallait aller vite. On chronométrait et quand on l’avait derrière soi on se disait qu’on allait pas aller trop vite parce que plus celle qui était contrôlée allait vite, plus les autres devaient faire pareil. C’était au détriment des autres ouvrières.

On se retrouvait entre copines, c’était formidable

Alors c’était certainement huit heures, midi. On avait une heure, quelque chose comme ça pour manger puisqu’on allait en bas, il y avait un réfectoire pour nous. On déposait nos gamelles, c’était vraiment convivial. Et on remontait une fois qu’on avait fini de manger. On recommençait jusque 5h30, 6h. Alors le lundi, le mardi, le mercredi, jeudi et vendredi. On avait son week-end. Non, on n’était pas à plaindre. Moi je dis qu’à l’époque… Puis j’étais jeune aussi, donc insouciante… Le travail c’était le travail. On se retrouvait entre copines, c’était formidable.

Des gens qui tout à coup avaient une aiguille dans le doigt

Il y a longtemps que je n’ai pas visité un atelier moderne, de toute façon il n’y en a plus. Je ne sais même pas s’il y en a encore ici dans la région. Mais il faut avouer, les machines, moi j’ai vu des doigts coupés, des gens qui tout à coup avaient une aiguille dans le doigt, oui quand même.

Une piqueuse tout simplement

Point de vue machines? Moi à l’époque c’était une piqueuse tout simplement. Mais après il y a eu des surjeteuses… Il y a eu des machines où ils faisaient les poches comme par exemple les fameux jeans. Vous voyez la poche elle est préparée, elle est appliquée… Ce sont des machines carrément spéciales.

L’histoire de la braguette

Moi je l’ai jamais fait parce qu’en principe on évitait que ce soit les femmes qui prennent les longueurs de pantalon. Mais pour prendre une longueur de pantalon, il fallait aller à l’entrejambe de ces messieurs et mesurer l’entrejambe du pantalon. Or, comme c’était de la très très belle confection, on devait le demander, c’était très simple : vous le portez par où? À droite ou bien à gauche? Et pourquoi, pourquoi? Parce que ça avait de l’importance pour l’aise du pantalon. Et pour ne pas gêner quand il y avait une femme qui devait prendre les mesures, on mettait le mètre ruban sur une règle et c’est la règle qui allait entre les jambes du monsieur. Voilà! Voilà l’histoire de la braguette!

Elle m’a toujours aidée dans la couture

J’ai perdu ma maman à onze ans, et ma marraine, parce que c’est ma marraine qui est devenue ma maman, elle m’a appris à coudre. Elle avait une machine à coudre encore avec une pédale qui n’était pas du tout électrique. J’ai fait ma robe de mariée grâce à elle. Elle m’a toujours aidée dans la couture.

Une table pour éplucher le tissu

À la naissance de mon premier enfant, j’ai eu tout près de chez moi un atelier de tissu pour faire de l’épluchage. Et j’avais à domicile, une table pour éplucher le tissu. Éplucher les pièces de tissu c’était enlever des pailles. On avait un genre de petite pince à épiler et on vérifiait les pièces de tissu et on enlevait les pailles. C’était vraiment un petit bout de fil qui dépassait, qui était pas à sa place… Alors vous voyez j’ai un petit peu tout fait.

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